Jour de marché
C’est aujourd’hui jour de marché. Nous allons tout au long des tentes Dressées rue de la Convention, Nous allons marchant doucement Afin de bader les étals. Dans le premier il faut chercher, Alors c’est en procession lente, Fouillant sans précipitation, Que j’en fais le tour bonnement Quand aucun film n’a mon aval. Puis les olives et les fruits secs S’offrent à nous et leurs senteurs Lors nous invitent à un achat Bien plus que le jeune employé Accroché à son téléphone. De quoi avoir une prise de bec. Des vêtements c’est le secteur, Quant au vent font des entrechats Et le vendeur n’est pas ployé Bavard comme un magnétophone. La préposée aux escargots Timide, jeune, réservée, N’accroche pas le chaland Mais se prête avec fort sérieux Au travail qui lui est confié. Là, gesticule un vrai cagot Qui des morts, ferait se lever, Si nous l’écoutions, harcelant Le client, prêt à vendre aux vieux Ne sachant pas à qui se fier. Tout aussi rond que ses rôtis, Et bavard, c’est le charcutier Dont la bulle incessamment happe Celle en sommeil de ses clientes Donnant le prix avec adresse. Adroit à mettre en appétit Et fêtard, c’est le poissonnier Dont la bulle vibrante attrape Les commandes et sous sa tente Gagne sa vie avec sa messe. Des fleurs, c’est la grande fête, Qui en symphonie de couleurs S’exhalent offrant leurs parfums Généreux ; et charmantes, ailées Comme le sont les libellules. Et vous les maraîchers vous faites Offre de très belles rondeurs ; De légumes nous avons faim Et de l’agrume il est aisé De convoiter les jolies bulles. Le marché est fini Le cabas est rempli Par ces instants unis Sommes bien à Paris.
Voyez-vous ici j’ai écrit cela en octosyllabes afin de montrer l’aspect paisible de ces instants. Certes un peu de mouvement était nécessaire, accompagnant notre marche aussi ai-je groupé les rimes par cinq, les faisant rimer toutefois deux à deux pour donner de l’équilibre à tout cela. Je n’ai pas donné toujours de structure interne aux vers laissant un peu de liberté à l’ensemble. Certains disent que la rime est contraignante et enlève de la spontanéité à la poésie. En fait je trouve qu’en général elle est plutôt créative, donnant des vers inattendus. Ici il y a une certaine liberté dans les premiers groupes de cinq et bien sûr moins dans les seconds. Nous voyons que liberté et contrainte se conjuguent de façon complexe, comme dans la vie en quelque sorte. Toujours un principe ternaire qui apparaît : liberté, contrainte et le mélange des deux. Question que j’avais envisagé dans un texte de « Mon âme, qu’en est-il ? ». Nous pourrions même dire qu’ils se nourrissent l’un l’autre, ce qui est un autre aspect de la complexité comme je l’exprime plus haut. Tout ceci est d’une très grande généralité et n’est pas innocent philosophiquement parlant.